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Le blog de Pierre Laporte

Blog politique d'informations et d'échanges d'un élu conseiller départemental et maire-adjoint de Tremblay en France en Seine St Denis. Blog basé sur la démocratie participative. Chantier ouvert sur l'avenir de la Gauche.

Mobilisation pour la COP21 : nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux (intervention en séance du Conseil départemental, 1er octobre 2015)

Publié le 2 Octobre 2015 par Pierre Laporte

Mobilisation pour la COP21 : nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux (intervention en séance du Conseil départemental, 1er octobre 2015)

Le Département a décidé de participer à la préparation de la tenue de la COP 21 et tout ce qui vient d'être présenté démontre de cette volonté.

Il y a, en effet, urgence à agir, mais sommes-nous à la hauteur des enjeux et avons nous pris en compte le rôle des citoyens dans cette COP ?

Le GIEC tire la sonnette d'alarme depuis 25 ans maintenant : le réchauffement climatique entraînera une hausse du niveau des océans, une augmentation en fréquence et en intensité des événements météorologiques extrêmes (tsunamis, tempêtes, …), une mutation des espaces naturels, un déclin de la biodiversité et une mise en danger des zones agricoles, une raréfaction de l'eau potable, une expansion des risques sanitaires.

Le réchauffement climatique porte aussi en lui les germes de conflits nouveaux, pour la ressource, pour les espaces viables, etc … Certains de ces phénomènes sont malheureusement déjà observables.

D'après le rapport annuel Global Estimates du Conseil norvégien pour les réfugiés, 22 millions de personnes ont dû fuir leur pays pour des raisons climatiques en 2013. Soit 3 fois plus que les réfugiés de guerre.

A une échelle plus proche, nous avons tous en tête qu'en région parisienne, les fortes chaleurs se combinent avec des pics de pollution aux conséquences sanitaires de plus en plus affirmées.

Rappelons-nous aussi que les populations les plus pauvres sont les plus exposées à la pollution.

Tout cela est connu et l'origine humaine du changement climatique est aujourd'hui avérée.

Pourtant, depuis le Sommet de Rio en 1992, malgré la gravité de la situation, les avancées sont suffisamment faibles pour être alarmantes.

On nous promet beaucoup, on s'engage tous azimuts, on appelle même à la « révolution » ! Quelle réalité recouvre ces mots ?

Il faut rappeler quelques éléments de fonds de la problématique.

Primo, en reprenant, sans recul, les éléments de langage de l'organisation de la COP, nous relayons déjà une première illusion : celle du seuil de 2°C d'augmentation de la température qu'il ne faudrait pas dépasser.

Mais il faut souligner que le choix de 2°c comme seuil de dangerosité, fixé par la Commission Européenne, est très contestable. Il est remis en cause dès 1990 par le Stockholm Environment Institue, et contesté aujourd'hui par plus de 100 Etats qui réclament un abaissement de ce seuil de dangerosité à 1,5°C.

Le dialogue d'experts (pourtant tous accrédités par les organisations internationales et missionnées par elles) lancé suite au Sommet de Cankun le dit clairement : la limite de 2°C est trop élevée, abaisser cette limite à 1,5°C réduirait fortement les risques.

Ainsi donc, dans le meilleur des cas, si les gouvernements concluaient un accord durant la COP21, ce serait sur une base dangereuse, et reconnue comme telle.

Mais, il est loin d'être certain qu'un tel accord advienne.

Aucun pays en effet n'envisage de revoir sérieusement ses engagements d'émissions de CO².

Or, si rien ne change, en 2020, 57 gigatonnes de GES équivalents CO² seront émises soit 13 de trop par rapport aux trajectoires acceptables pour ne pas dépasser les 2°C !

Mobilisation pour la COP21 : nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux (intervention en séance du Conseil départemental, 1er octobre 2015)

Pourquoi en sommes-nous encore là ?

Parce que prétendre réguler le climat par des marchés carbone et des permis de polluer, miser sur la technologie, écarter toute contrainte environnementale pour préserver les logiques court termistes … ne sont pas des solutions.

Comment engager la transition écologique, quand on réduit les capacités d'investissement de l’État et des collectivités locales ? Quand on supprime 700 postes au Ministère de l'écologie ?

Comment engager la transition écologique quand Monsieur Macron développe les transports en autobus contre les transports ferroviaires ?

Comment répondre à un impérieux besoin de justice sociale et climatique quand on cède des pans entiers de la vie aux intérêts privés, ceux-là mêmes qui sponsorisent la COP21 et qui agissent au travers de très puissants lobbies pour que rien de contraignant ne sortent des rendez-vous internationaux sur le climat ?

Comment conserver des marges de manœuvre, comment préserver des espaces non soumis à la marchandisation et à la jungle du commerce ?

De plus, à l'heure où nous accueillons la COP21, plusieurs projets, antinomiques de la lutte contre le réchauffement climatique tentent d'aboutir, sur notre département, certains avec l'appui direct de l'Etat.

Au Fort de Vaujours, la société St Gobain – Placoplatre, partenaire de la COP 21, souhaite démolir des dizaines de bâtiments en vue de l’exploitation d’une nouvelle carrière de gypse à ciel ouvert sur l’ancien site contaminé du Commissariat à l’Energie Atomique.

Entre l’Etat qui veut éviter une dépollution coûteuse et préfère donc cacher la vérité, et la société Placoplâtre qui souhaite rapidement commencer ses travaux à moindre frais, les conditions sont réunies pour un passage en force. Est-ce trop demander demander qu'un organisme indépendant, non payé par Placoplâtre - St Gobain, établisse les protocoles et les suivis comme le demandent les associations et les maires ?

On retrouve l'engagement de la responsabilité de l'Etat sur le Parc de la Poudrerie dont on attend toujours, depuis plusieurs années, des informations précises sur le niveau de pollution des sols et la dépollution indispensable.

Que dire du projet pharaonique d’Europa City ? Nous assistons à une extension non contrôlée de la Métropole parisienne laissée aux mains des promoteurs immobiliers et affairistes, au détriment des terres agricoles uniquement considérées comme des réserves foncières. Pourtant, comment prétendre vouloir diviser par 4 nos émissions de gaz à effet de serre quand on envisage la destruction de 80ha de terres agricoles stockant le carbone et régulant la température dans une zone urbanisée, au profit d'un projet climaticide avec ses 30 millions de visiteurs par an, son gouffre énergétique qu'une piste de ski … ?

Le parc Georges Valbon est également la cible d’un important projet d’urbanisme (Central Park) menaçant gravement un espace pourtant classé Natura 2000. Je ne développerai pas ...

Voilà quelques uns des gros défis qui se posent à nous localement.

Il ne faudrait pas oublier la lutte contre la précarité énergétique, le développement des circulations douces et des transports en commun, des énergies renouvelables.

Autant de sujets sur lesquels nous pourrions être en pointe si la raréfaction de la ressource financière, imposée par le dogme de la réduction des dépenses publiques, complété de son volet austéritaire, ne nous en privait pas.

Je souhaite enfin attirer l'attention de notre assemblée sur un autre point essentiel.

Dans notre mobilisation ne passons pas à côté d'un acteur essentiel.

En juillet 2014, j'interrogeais cette assemblée sur la présence de la société civile au sein des négociations de la COP21, sur l'appui que notre Département pouvait apporter aux initiatives de type Alternatiba, dont le tour de France à vélo pour sensibiliser sur des alternatives porteuses de changement, s'est achevé place de la République, accueilli par 50 000 personnes le week end dernier.

Je ne vois aujourd'hui aucune réponse à cette interrogation.

Aucune mention même du terme « Alternatiba » dans nos documents.

Et Belaïde Bedreddine a eu raison dans sa présentation de citer l'initiative de la Coalition Climat à Montreuil début décembre.

Quel message envoyons-nous à la Coalition Climat 21 qui représente plus de 130 organisations qui vont de Greenpeace aux scouts laïcs et qui prévoit de nombreuses intiatives à travers le monde, et en Seine-Saint-Denis ?

Ces citoyens se réuniront le 11 octobre prochain dans le parc de la Courneuve, dans la cadre d'une « Grande Convergence », rassemblement pour la défense et l’extension du Parc de la Courneuve auquel sont conviés toutes celles et tous ceux qui, en Ile-de-France, se battent contre les pollutions, les discriminations territoriales, environnementales, pour un meilleur cadre de vie et un aménagement soutenable.

Quelle place occuperons-nous dans cette initiative ? Quel soutien lui apportons-nous ?

Le 29 novembre la société civile rappellera son attachement à la question climatique par une marche dans Paris, le 12 décembre, un rendez-vous international est prévu à Paris …

Autrement dit, allons nous tourner le dos à cette dynamique citoyenne, auto organisée, pour nous contenter de relayer un discours déjà dépassé par la réalité des évolutions climatiques ?

N'avons nous pas le devoir, pour nos enfants, de participer à faire converger, à fédérer, à soutenir, dans le respect mutuel, tout ce qui peut faire du combat contre la le réchauffement climatique le combat du plus grand nombre ?

C'est en tout cas ce qui est attendu de nous, du moins, de toutes celles et ceux dans cette assemblée et ailleurs qui déclarent refuser la fatalité d'un mode de développement productiviste insoutenable.

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R
Bravo pour ton intervention mon cher Pierre !<br /> Bises <br /> René Durand